Lundi 30 juillet 2012 – Ramonville
Julien,
Maintenant
je vais t’écrire une lettre tous les jours.
J’ai commencé à relire ton mémoire.
«... le lien d’amitié comme un espace créé par les deux amis,
comme un espace inédit et modelé par la relation qu’ils
entretiennent. Par l’habitude à s’entretenir et à se voir, à
partager du temps ensemble, les amis se créent un lieu commun, un
espace de partage dans cette zone immatérielle d’entrelacement,
cet ENTRE-EUX-DEUX où aucune des singularités n’est plus
prégnante qu’une autre, là où justement s’amorce une troisième
entité qui est l’amitié, zone tampon, zone commune n’appartenant
à aucun des deux mais bien aux deux simultanément.»
Ce
passage m’a bien évidemment interpellé au vue de nos réflexions
actuelles. Me permets-tu d’y penser bien que nous ne soyons pas, à
proprement parlé, des amis ? Tu parles aussi d’un «terrain
d’entente» et j’ai envie de l’entendre comme un terrain
d’attente.
Ce terrain d’attente, c’est les pages blanches que je t’adresse
avec mes lettres. Les feuilles blanches sont l’espace qui nous
sépare, l’espace de la parole donnée. Je poste ma lettre en même
temps que l’attente d’une réponse.
Nous écrivons à quatre
mains dans notre espace commun. Et les feuilles blanches sont un
terrain virtuel puisqu’il est plein de potentialités, de
puissance. La blancheur de la page aspire ton attention. C’est
comme si elle était déjà écrite lorsque je la glisse dans
l’enveloppe.
À
toi, Leslie.