Jeudi 30 août 2012 – Ramonville
Julien,
Aujourd’hui il fait gris et il pleut, ce
qui a pour effet de me faire sentir encore plus enfermée. Je suis
enfermée ici à travailler devant mon ordinateur, et je suis
enfermée dans mon corps car mon immobilité m’empêche d’accéder
à sa connaissance. J’ai besoin de mouvements, de déplacement. Un
corps n’est pas fait pour rester ainsi jusqu’à l’épuisement
dans la même position. J’ai l’impression que ce manque de
mouvement entrave aussi des facultés de réflexion. Mes gestes se
réduisent à un minimum. C’est une parcimonie de vie. J’ai
besoin de marcher, de marcher longtemps. Ou de courir. De nager. Je
voudrais sentir mon corps au-delà d’un cul sur une chaise et de
deux mains s’activant médiocrement sur un bureau.
En ce moment, j’ai perdu la force de dessiner, comme tu
le sais. Je crois que c’est en partie parce que ce geste ne me
servirait à rien car il ressemble déjà trop à la vie que je mène
: remplissage entêtant, réduction de l’espace, immobilité. Je me
demande quelle est la différence entre ma façon de vivre l’année
dernière et ce que je fais depuis cet été. Pour quoi suis-je
autant frappée par cette absence de mouvement. La solitude ?
L’enfermement ? Je ne fais presque pas de pauses dans mon travail,
mis à part pour me nourrir. Tu sais bien que j’aime manger, mais
désormais je ne conçois plus la nourriture que comme un poids
supplémentaire qui me procure une énergie dont je n’ai que faire.
Je suis insomniaque, même le sommeil n’apporte plus un contraste
assez grand pour apaiser mon esprit. J’arrive à un point limite de
pesanteur et je me sens tirée vers le néant.
Mais ce constat me fait presque plaisir, me rassure en
quelque sorte, car maintenant je n’ai plus le choix : IL FAUT QUE
JE ME BOUGE !
À
toi, Leslie.